L’énergie de Cuisson dans les Camps de Réfugiés

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Notions élémentaires | Conseils politiques | Plan | Conception et Application (offre ICS) | Technologies et pratiques | Conception et Application (Provision de bois combustible) | Changement climatique


Aperçu

Cet article donne un aperçu sur l'énergie de cuisson dans les camps de réfugiés. Il met l'accent sur la pénurie de bois dans les camps, les problèmes qui en découlent et les solutions possibles pour rendre durable l'approvisionnement en énergie. Ces aspects sont démontrés par deux études de cas, et des défis spécifiques sont mis en évidence.

Dans cet article les personnes déplacées ne sont pas mentionnées séparément, et peu d'attention est accordée aux interventions à court terme ou à des structures situées hors des camps.


Introduction

Le HCR définit un réfugié comme étant une personne qui, "en raison d'une crainte fondée d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social particulier ou de ses opinions politiques, se retrouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou ne veut pas en raison de ladite crainte se réclamer de la protection de ce pays ". Il y a actuellement plus de 10 millions de réfugiés dans le monde[1], vivant dans des camps de tailles et de conditions différentes.

En raison de la situation, les camps de réfugiés sont souvent installés de manière abrupte et incontrôlée. Ils abritent des dizaines voire des centaines de milliers de personnes dans un espace restreint et inapproprié et arrivent sans nourriture, sans abri, et elles dépendent des dons.

Certains Etats hôtes de ces réfugiés internationaux choisissent parfois une zone inappropriée pour l'installation des camps en vue de décourager leur installation dans le long terme. Il en résulte une dégradation importante de l'environnement. Bien que beaucoup de dons en nourriture et en médicaments soient fournis de l'extérieur par les organismes d’aide, les familles doivent elles-mêmes se procurer ou acheter leurs combustibles. L'énergie de cuisson est primordiale pour les réfugiés, et le bois utilisé avec des techniques culinaires y est quai exclusivement utilisé. Il s’ajouter à la demande en bois utilisé pour les infrastructures et à celle destinée à créer des activités génératrices de revenus.

Après seulement six mois, la demande en combustible ligneux en Tanzanie après un afflux de 500 000 réfugiés rwandais a entraîné la déforestation d'un rayon de cinq kilomètres autour du site où le camp était installé[2]. Un exemple encore plus frappant a été vécu à Dadaab, dans le nord-est du Kenya, sans doute le plus grand camp de réfugiés du monde, où le rayon de déforestation a progressivement augmenté de 5 à 10 puis à 70 km autour du camp ces 20 dernières années[3]. Dans ce cas, les ménages ne peuvent plus se procurer du bois à souhait.

Les Problèmes Multidimensionnels de L’approvisionnement en Énergie

Le manque de ressources en biomasse accessibles influence les réfugiés à plusieurs niveaux[4][5][6]:

  1. La dimension de la sécurité alimentaire: la nourriture de base telle que le riz ou les céréales est habituellement distribuée aux réfugiés, mais elle est indigeste si elle est consommée crue. Beaucoup choisissent de troquer le peu de nourriture qu'ils ont pour du bois pour au moins fournir un peu de nourriture cuite à leurs familles.
  2.  La dimension sanitaire: les problèmes liés à l'énergie de cuisson s'ajoutent à ceux liés à la malnutrition qui est très répandue dans les camps. De plus, la combustion inefficace du bois engendre de la fumée qui pollue l’air intérieur. Cela favorise les maladies respiratoires qui jouent sur le dynamisme des personnes des personnes, voire leur coûtent la vie, d’autant que les médecins sont peu disponibles dans la plupart des camps de réfugiés.
  3. La dimension liée à l'abri: utilisées comme alternative aux tentes, des maisons plus stables et clôturées sont généralement construites à partir de bois, qui doit être recueilli à proximité du  camp. Le flux continu de personnes accroît d’autant la demande à un abri et à d’autres infrastructures, ce qui amène à puiser dans les ressources autour du camp.
  4. La dimension sécuritaire: les sites où sont installés les camps sont habituellement des endroits inhospitaliers. Plus longtemps on demeure dans les camps plus on devient vulnérable vis-à-vis des agressions, des vols, des explosions de mines anti personnelles, des attaques d’animaux sauvages, des violences sexuelles ; tant de problèmes et d’effets dissuasifs pour la collecte de bois. Une enquête[5] menée en 1993 dans le camp de Dadaab, montre qu’une famille sur vingt interrogées a un parent victime de viol – même si ces cas passent sous silence.
  5. La dimension économique: plus grand est le temps que les femmes accordent à la collecte de bois-énergie pour leurs ménages, moins elles ont de temps à accorder aux distractions, aux activités génératrices de revenus ou à d’autres activités visant à améliorer les conditions du ménage et de la communauté.
  6. La dimension environnementale: la déforestation cause aussi un autre problème majeur qui est la dégradation générale de l'environnement. Elle se traduit par l’érosion terrestre, les inondations, les coulées de boue et surtout la baisse conséquente des eaux souterraines. Les problèmes résultant de cette dégradation constituent un obstacle pour la gestion des camps et affectent  encore plus les réfugiés qui déjà font face à des problèmes liés aux ressources naturelles et à l’insuffisance des terres arables.
  7. La dimension conflictuelle : les populations locales vivant autour des camps souffrent elles aussi de la déforestation et de ses séquelles. Les autorités nationales ou régionales interdisent souvent la collecte de bois-énergie par les réfugiés. Mais étant donné l’absence d’activités génératrices de revenus leur permettant de s’acheter du combustible pour la cuisson des repas, la seule alternative qui leur reste est la collecte illégale de bois-énergie[4]. Cette situation provoque une aggravation des conflits locaux, des arrestations, voire des menaces de fermeture des camps.


Les Interventions dans le Domaine de L’énergie de Cuisson

Le type d'intervention nécessaire dépend en grande partie du contexte de la crise humanitaire. Le CPI (Comité permanent interorganisations) distingue les activités nécessaires pour les interventions dans le domaine de l’énergie de cuisson en deux niveaux : le cas d’extrême urgence dans le court terme, le cas des crises de longue durée et les situations transitoires qui nécessitent toutes deux des solutions durables.

CPI(2009) Matrice sur les Rôles et Responsabilités de l'Agence pour assurer une stratégie multisectorielle coordonnée des carburants dans les situations humanitaires


L’énergie de Cuisson dans les Situations D’urgence

Dans le cas où des interventions immédiates sont nécessaires, suite à une catastrophe naturelle ou juste après un afflux de réfugiés, les organisations humanitaires réagissent souvent promptement, en attirant une vaste couverture médiatique, mais aussi des fonds provenant de divers donateurs et en assurant la mobilisation d’un grand nombre de personnes. Ce sont bien sûr des événements qui nécessitent des fonds assez conséquents.

Au démarrage de l’intervention, la dimension sanitaire, l’accès au logement et la sécurité alimentaire sont prioritaires. Dans le court terme, il sera certainement nécessaire de fournir de la nourriture, qui sera probablement déjà cuite. Des interventions propres aux combustibles de cuisson ne seront nécessaires que dans des endroits spécifiques, mais les mesures relatives à cette énergie ne devront pas être négligées à ce stade.

En effet, c’est uniquement à cet instant qu’on peut penser à un aménagement spécifique du camp, notamment pour offrir, par exemple, des services de cuisson qui seront partagés entre les réfugiés.

Le Bureau d’aide aux victimes de catastrophes suggère [9] que les programmes de fourneaux économes en combustible ne sont utiles que si la situation d'urgence dure plus de 12 mois, étant donné qu’il est impossible de concevoir et de mettre en œuvre sur le fil, un programme qui soit bien élaboré. Ce qui justifie l’absence d’interventions en faveur des foyers améliorés  dans le cas d’une période de temps plus courte. Cependant, les fourneaux démontables peuvent également être importés dans les premiers mois, ce qui permet une distribution en plus grand nombre tout en assurant la diffusion d’un produit de haute qualité. Le combustible de base qui sera utilisé pour ces fourneaux dépendra de sa disponibilité et du lieu où est implanté le camp. Il est clair que les foyers améliorés institutionnels peuvent jouer un grand rôle en assurant l’approvisionnement en nourriture pendant cette période.

Dans le cas d’une crise de longue période, la conception des interventions doit se focaliser sur la durabilité écologique et économique.


L’énergie de Cuisson dans les Interventions à Long Terme

Trois approches principales peuvent améliorer le manque d'approvisionnement en énergie de cuisson appropriée dans les camps de réfugiés. Elles sont non-exclusives et elles doivent se réaliser de façon complémentaire. La première consiste à réduire la quantité de bois-énergie nécessaire pour cuisiner certains repas. La deuxième est de rendre la récolte du combustible durable à travers un mode de gestion approprié du bois. La troisième consiste à fournir un combustible et des technologies de cuisson alternatifs.



Réduire la Demande en Bois-énergie

Il existe trois moyens principaux et importants pour réduire la demande en bois-énergie destiné à un usage domestique: l'introduction de foyers améliorés, la mise en place d’une cuisine partagée et l’amélioration des pratiques culinaires.

La conception et l’évolution des foyers améliorés  varient selon la demande dans une région spécifique ou pour un groupe ayant un même niveau de revenu. Les fourneaux améliorés ont fait leur preuve au cours de ces dernières décennies, comme celui de Mandeleo à Dadaab qui  économise de 40% la consommation en bois-énergie[6].

Dans les camps de réfugiés où les familles n'ont aucun revenu, les foyers améliorés sont parfois distribués gratuitement, mais une meilleure façon pour les vulgariser serait de les introduire dans les programmes de travail avec contrepartie. Ce sont des programmes dans lesquels des personnes travaillent un certain nombre d'heures, souvent en faisant des activités respectueuses de l'environnement, comme la plantation d'arbres et autres et, en contrepartie, elles reçoivent un foyer amélioré une fois les travaux réalisés. L’un des facteurs clés avec ce type de programme est d’ordre psychologique en faisant passé le réfugié d’un du statut de chômeur à celui de travailleur qui, de surcroît, améliore sa situation. Mandeleo, par exemple, signifie « progrès ».[7]


Pour obtenir un approvisionnement durable en foyers améliorés, la chambre de combustion, qui est la partie la plus technique, peut être importée avant d’être recouverte, sur place, d’argile ou de métal. Cette méthode est susceptible de fournir un produit plus efficace que la fabrication complète des foyers sur place par un personnel majoritairement non qualifié. C’est un compromis malheureux, mais significatif entre la responsabilisation des communautés dans la production des foyers et leur capacité à le faire avec un certain niveau de qualité.


► Plus d’informations sur les foyers améliorés: (Improved Cookstoves and Energy Saving Cooking Equipment ce que c’est?, BMZ / GIZ – La cuisine c’est la vie (en anglais))


La deuxième méthode pour réduire la consommation de bois-énergie est d'introduire un système de cuisine centrale ou partagée. Celle-ci ne nuit en aucune façon à l’utilisation de foyers améliorés. Il existe de nombreux modèles de foyers dits institutionnels et dédiés à la cuisson d’une plus grande quantité de nourriture. Souvent, grâce à l'amélioration du transfert de chaleur, les foyers institutionnels économisent relativement plus de bois que ceux à usage domestique. La  cuisine communautaire sous-entend tout simplement que plusieurs ménages se regroupent pour cuisiner ensemble en vue d’économiser l'énergie. Toutefois, ceci reste difficile à intégrer dans une communauté, où les familles préfèrent cuisiner en fonction de leur goût individuel et en fonction de leurs revenus. Les réfugiés ayant sur eux des objets de valeur ou ceux possédant du bétail auront des habitudes alimentaires différentes de ceux qui n’ont rien sous les mains et qui dépendent de l’aide.

La troisième solution, qui est complémentaire aux autres, est d’utiliser des techniques renforçant l’efficacité énergétique, principalement du bois, dans les pratiques culinaires. Avec l'expansion du camp suite à un afflux de réfugiés, l’intégration de cuisines améliorées bien aménagées dans les nouvelles maisons construites est réalisable. De nouvelles marmites peuvent être introduites tout au début de la construction, et avec la forte densité de la population, la diffusion de ces techniques de cuisson et produits devrait s’étendre rapidement. En maintenant  la nourriture au chaud pendant de longues et en évitant de cuire des repas plusieurs fois par jour, les dispositifs de rétention de chaleur peuvent faciliter la prise en charge des réfugiés qui sont malades ou blessés et qui peuvent seulement manger de petites portions.


General Kitchen Management Practices

Heat Retainers - Thermos Flasks and Fireless Cookers

Firewood Management Techniques

USAID: Fuel-Efficient Stove Programs in Humanitarian Settings: An Implementer’s Toolkit (en anglais)



Accroître L’approvisionnement en Bois-énergie

La réduction simple de la consommation en bois-énergie ne garantit pas nécessairement la durabilité de la ressource, en particulier dans les zones surpeuplées telles que les camps de réfugiés. Une consommation réduite freine la pression relative à l’utilisation des ressources en bois à un moment donné, mais cela ne signifie pas nécessairement qu’il y a une stabilité. L'échelle est importante, la stabilité ne peut s’obtenir que l'offre s’ajuste à l’augmentation de la demande en bois.

La mise en place de ceintures vertes, ou les projets allant dans ce sens, sont  devenus inhérents à la situation des réfugiés. D'autres options telles que la plantation d’arbres entre les maisons ou les pépinières dans les zones clôturées sont aussi réalisables. Ces programmes peuvent être combinés avec la vente de foyers améliorés, aux initiatives des foyers contre-travail ou de travail contre argent. Les arbres ont aussi des effets positifs non négligeables sur les réfugiés, tels que le plaisir d’avoir de la verdure ou de se faire de l’ombre en période de chaleur.

Les programmes varient selon les lieux, et comprennent souvent différents types d'arbres. Les pois d’angoles, par exemple, sont capables de fournir du bois-énergie ce qui réduit la consommation relative du bois, tout en offrant une alternative à la nourriture de base.


Plus d’information sur le pois d’angole (en anglais) (page 57 onwards)

Woodfuel Production Options / Options de Production pour le Bois-énergie


Utiliser des Carburants Alternatifs

Alors que le bois de chauffage est en manque dans les camps, la solution la plus simple est peut-être de trouver des solutions de rechange. Il y a une grande variété de carburants alternatifs disponibles pour la cuisson, mais toutes ne sont pas réalisables sur le plan économique, social et environnemental. Ces carburants alternatifs vont de l'utilisation de briquettes obtenues à partir de déchets issus de la biomasse à l’utilisation de fourneaux solaires.


Les Briquettes

Les briquettes sont obtenues grâce aux résidus séchés, carbonisés et compressés provenant de l’agriculture et de la sylviculture. Elles ont l'avantage d'être très faciles à utiliser, quantifiables et simples à conserver tout en réduisant jusqu'à 40% le dioxyde de carbone qui serait émis par le bois de chauffage[8]. De plus, la production de briquettes en petite quantité peut fournir de nombreux emplois individuels. Cependant, ceci n’est possible que s'il y a une grande quantité disponible de déchets nécessaire à la production d’un carburant de haute qualité. Dans la pratique, aucun modèle de briquette ne s'est avéré suffisamment efficace ou durable pour que sa promotion soit généralisée.


► Further Reading: Cuisiner avec du Bois-énergie Solide Non Issu de la Biomasse

Micro-Gasification: Cuisiner avec du gaz à partir de la biomasse



Le Gaz

Même si c’est un combustible fossile, le gaz de pétrole liquéfié est un carburant très pratique et dont la combustion est propre. Dans les pays en développement, de nombreux ménages souhaitent avoir du GPL pour cuisiner, mais ils ne peuvent pas s’en procurer. Ce problème lié  à l’accessibilité et aux chaînes d'approvisionnement fiables est presque identique  à celui rencontré dans les camps de réfugiés. À cause de la corruption et de la criminalité, les wagons acheminant le GPL n’arrivent pas tous dans les camps, et de nombreux ménages en viennent à vendre leur ration de GPL pour se payer de la  nourriture. La proportion vendue à l'extérieur du camp peut atteindre 80%[7].
Bien que certaines organisations humanitaires soient disposées à fournir du GPL et même de foyers, cette solution est de toute vraisemblance peu fiable, coûteuse, et non viable une fois que les financements sont épuisés. Cette situation est similaire pour la cuisine basée sur le kérosène.

Cooking with Liquefied Petroleum Gas (LPG)

LPG Stoves



Les Fourneaux Solaires

Les fourneaux solaires sont l’objet d’intenses débats, mais dans le contexte des camps de réfugiés installés pour de longues périodes et où le carburant est manquant, ils deviennent plus que nécessaires. La cuisson lente, le risque de vol, le changement majeur des habitudes de cuisson, et l'inconfort de la cuisson sous le soleil sont autant d’inconvénients potentiels. Toutefois, ces foyers sont acceptables dans l’optique d’économiser du bois, en particulier s'ils sont subventionnés ou offerts.

Dans de très rares cas, les partisans de cette technologie mettent en valeur ces foyers comme une solution autonome, alors qu’ils permettent seulement de cuire certains aliments et que leur introduction sur le marché a souvent échoué.

Cependant, les fourneaux solaires peuvent fonctionner comme un complément à la cuisine recourant à la biomasse où, par exemple, la nourriture de base telle que le riz est cuit à partir du foyer solaire tandis que les accompagnements sont préparés plus traditionnellement. Ces foyers sont également une bonne option pour bouillir de l’eau pour le thé. Une étude[9] effectuée dans le camp de réfugiés d’Idrimi au Tchad indique que plus de la moitié des femmes du camp a arrêté de ramasser du bois grâce à l'utilisation de fourneaux solaires.

Cependant, une autre étude[10], réalisée dans le camp de réfugiés d'Osire, en Namibie, constate que malgré la possibilité d’économique 40% du combustible, seuls 10% des ménages possédant un fourneau solaire l’utilisent régulièrement, les autres préférant cuisiner avec le peu de kérosène fourni. Lorsque des dons en bois de chauffage sont réalisés par certaines organisations, ce taux tend à décroître encore plus.


En outre, les foyers solaires ne peuvent pas être rangés de façon discrète ; ce qui rend les utilisateurs vulnérables au vol et aux intrus, dans les milieux où il est coutumier d’offrir l’hospitalité aux étrangers.

► Plus d’informations sur les foyers solaires (Cooking with Sun)

En somme, une solution miracle à la crise de l'énergie de cuisson dans les camps de réfugiés n’existe pas. Différents combustibles peuvent être adaptés dans des situations différentes, mais chaque intervention doit être étudiée avec soin.


Les Défis

Les programmes dans les camps de réfugiés font face à plusieurs défis. Le manque de matériel, la dépendance continue vis-à-vis de la biomasse, les problèmes de coordination, le manque de fonds et l'insuffisance des infrastructures sont quelques-uns des problèmes rencontrés par les projets  élaborés pour gérer les situations des réfugiés.


La Planification de Projet à Court Terme

Les programmes destinés aux camps de réfugiés sont souvent prévus pour de courtes périodes (généralement pour 6 mois). Ceci complique le lancement de projets durables, effectués en partenariat avec d'autres organisations ou bien la mobilisation de fonds. La plupart des organisations humanitaires se concentrent sur des activités de secours immédiats et elles ignorent les solutions intensives et durables puisque les structures de pouvoir et les programmes politiques dédiés aux camps de réfugiés ne sont pas souvent assez clairs. De plus, les gouvernements nationaux ne s’engagent pas souvent à soutenir des systèmes de camps de réfugiés qui soient durables puisqu’ils craignent que les réfugiés s’y installent sur le long terme.


Les Défis en Matière de Coordination

Dans de nombreux camps, un grand nombre d'organismes d'aide présents opère selon un idéal et plan d’opération qui lui est propre. Il y a un manque de politique partagée pour la coopération sur des aspects spécifiques liés à la gestion des camps, tels que la fourniture de carburant. À titre d’exemple, une livraison non programmée de nourriture ou de combustible qui serait effectuée par une mission d’assistance d'urgence pourrait gravement perturber une autre intervention ayant une visée à plus long terme.


La Forte Croissance Démographique

L’un des défis majeurs des programmes spécifiques aux réfugiés est la forte croissance démographique et l'afflux constant de personnes, car les programmes doivent être conçus sur une grande échelle et avec une augmentation de la capacité d’accueil dans le temps. À Dadaab, au Kenya, le programme des foyers améliorés a été confronté à de graves problèmes liés au remplacement des foyers brisés qui venaient s’ajouter aux exigences de production pour répondre aux besoins des milliers de familles nouvellement installées dans le camp.


Le Manque D’infrastructures

Le manque d'infrastructures est un autre problème  majeur dans les camps de réfugiés.  Les routes dans les camps ou en dehors des camps sont souvent  inexistantes, ce qui  rend très difficile l’approvisionnement à la fois en biens et en matériels, notamment pour la fabrication de foyers. Dans certains cas, la qualité des routes peut s’améliorer avec le temps, dans d'autres, en particulier lorsque les camps sont situés dans des zones de conflit, la situation reste difficile. Cet aspect décourage les organisations humanitaires d'envoyer leurs équipes ou d’expédier l’approvisionnement de même qu’il dissuade les réfugiés de quitter le camp pour y planter des arbres et faire de l'agriculture.


Les Défis Environnementaux

Un autre problème subsiste, car même si la consommation de bois diminue significativement, la demande dépasse souvent, et de loin, les capacités de production de l'écosystème. Dans la plupart des cas, la réduction de 40% du combustible consommé grâce à l'utilisation combinée de différents instruments et de techniques de cuisson reste cependant insuffisante. Le reboisement, la gestion et l’aménagement durable des forêts sont nécessaires, mais ils restent difficiles et très coûteux à mettre en œuvre.


Le Manque D’emplois Alternatifs

L’interdiction ou la réglementation de la collecte du bois peut provoquer des pertes d’emplois chez de nombreux réfugiés. Ils devront alors trouver d'autres activités génératrices de revenus. Parmi elles, les activités traditionnelles de brassage de la bière ou de fabrication de brique requièrent des quantités importantes en carburant. D’autres alternatives viables doivent être trouvées et la fabrication de foyers ou la plantation d’arbres sont peu susceptibles de fournir assez de travail. S'il n'y a pas suffisamment d’options  pour générer des revenus, le carburant et les foyers distribués seront revendus sur le marché pour permettre de satisfaire d'autres besoins de base.


Des Études de Cas[11]

Au Darfour

Au Darfour, Soudan, le PAM a mis en place une approche globale en 2010 intitulée SAFE. Trente-trois centres de formation en gestion efficace du carburant y ont été établis pour venir en aide à 200 000 ménages. Cette approche se compose de plusieurs parties et notamment de foyers économes en carburant qui sont combinés avec des options de carburants alternatifs, la création d’activités génératrices de revenus et l’implantation de pépinières d'arbres.
Le programme introduit aussi la production de foyers économes en combustible fabriqués à partir de produits disponibles localement. Des sessions de formation régulières sont offertes dans le but de renforcer les capacités des communautés dans la fabrication et l'entretien des nouveaux foyers. Le PAM a également introduit 1.600 unités de carburant en briquette au sein des communautés pour qu’elles s’approvisionnent en carburant alternatif.
Des programmes travail contre-nourriture ont été créés pour la mise en place de 33 pépinières communautaires où  750 000 arbres ont été cultivés et où trois principaux objectifs étaient recherchés: apporter du bois-énergie, mais aussi du bois et des fruits qui pourront être revendus par la population. Le PAM a introduit aussi d’autres programmes de formation axés sur les pratiques agricoles, sur l'alphabétisation et sur la promotion de l'artisanat.

Cette approche multidimensionnelle orientée vers la communauté comporte un grand potentiel de succès et elle est viable à long terme. Le PAM planifie également de transférer ce programme au gouvernement d’ici 2 à 4 ans. Cependant, même si les foyers économes en combustible, proposés comme alternatives, consomment moins de combustible et des briquettes, la demande dépasse toujours l'offre. Aussi, la destruction de l'environnement reste encore un problème. Par conséquent, le PAM met beaucoup l'accent sur le reboisement et le travaille pour trouver les moyens susceptibles de réduire la consommation de bois de chauffage.


En Haïti

En Haïti, le tremblement de terre survenu en janvier 2010 a provoqué une situation où de nombreuses personnes se sont retrouvées dans un besoin d'assistance à court terme. Le taux élevé des couvertures médiatiques a conduit à un débordement des multiples dons venant de diverses organisations. Ceci a conduit beaucoup de ces organisations à rapidement changer de zone d’intervention. La plupart des ONG encore actives se concentrent toujours sur les activités de secours immédiats, ou elles font la promotion de solutions spécifiques, mais elles n’arrivent toujours pas à se coordonner ni à avoir une stratégie à long terme.

Avant le séisme, la majorité des Haïtiens des zones urbaines utilisaient le charbon comme énergie de cuisson, tandis que ceux des zones rurales utilisaient exclusivement le bois-énergie. Avec le tremblement de terre le peu de gens qui avait accès au gaz et à  l'électricité sont retournés vers le charbon, car c’était alors le seul combustible disponible, et son prix a logiquement augmenté. Les pénuries de bois, en particulier autour des camps, se sont alors aggravées.

Le programme SAFE du PAM a favorisé le passage, dans les écoles, des foyers à charbons vers des foyers institutionnels qui utilisent des briquettes comme combustible. L’impact sur l’environnement de la situation décrite ci-dessus, a conduit le PAM à compléter l’intégration de ces nouveaux foyers institutionnels par une chaîne de production de briquettes. De plus, il travaille également sur le développement d’une production locale de ces foyers afin qu’ils soient plus facilement reproductibles. Cette approche globale qui prend aussi en charge toute la chaîne de production peut s’avérer durable. Jusqu'ici, 200 000 personnes ont bénéficié de ce projet.


Extra: Le Programme PAM-ASBEA

Le programme du PAM intitulé SAFE (Safe Access to Firewood and alternative Energy) qui a été lancé en 2009, compte parmi ses partenaires la Commission des femmes Refugiées, le HCR, la FAO, et le PNUD. La GIZ a également apporté son expertise technique et ses expériences sur le terrain lors de la création de SAFE.

En septembre 2012, 1,6 million de personnes dans six pays différents ont bénéficié de l’aide apportée par cette initiative. Ce programme vise aussi d’autres pays et compte atteindre un total de 6 millions de réfugiés. L'approche est multidimensionnelle et se concentre sur la protection, l'environnement, la santé, la nutrition, l'éducation et les moyens de subsistance.
En 2012, SAFE a organisé un atelier pour faire un résumé des leçons tirées et pour partager les expériences vécues sur le terrain dans les 6 pays. Il a également lancé un manuel regroupant des informations pratiques et des ressources pour la programmation. Les points clés sont les liens entre les enjeux de SAFE et la sécurité alimentaire, le guide opérationnel, les pratiques prometteuses, les leçons tirées, et les documents de référence.

Pour se développer, SAFE espère intégrer le programme dans les opérations du PAM par le biais d’une approche plus structurée, d’un porte-parole de haut niveau et par l'amélioration de la stratégie de financement.

Lien vers le site du PAM

Liens vers le manuel du PAM sur l’approche SAFE (en anglais)


Informations Complémentaires


Références

Cet article a été publié par la GIZ HERA. Il est essentiellement basé sur les expériences, les leçons apprises et les informations recueillies par les projets « fourneaux améliorés » de la GIZ. Vous pouvez trouver plus d'informations sur les auteurs et les experts de l'original «Cooking Energy Compendium» dans les mentions légales.

  1. UNHCR, Refugee Figures: http://www.unhcr.org/pages/49c3646c1d.html
  2. Dorp, M. van (2011) Energy needs in emergency response operations: policies and best practice. Boiling Point 2011 No. 59 pp. 16-18
  3. Gitau, Gerald Chege (2011).The GIZ Dadaab Household Energy Project. Presentation held during an improved cookstove colloquium at Nairobi Sarova Panafric on 7th June 2011fckLRhttps://energypedia.info/images/5/57/GIZ_Dadaab.pdf
  4. 4.0 4.1 Lyytinen, Eveliina (2009). UNHCR New Issues in Refugee Research, Household energy in refugee and IDP camps:challenges and solutions for UNHCR. Research Paper No. 172.
  5. 5.0 5.1 Habermehl, H. (1997) Benefits of Household Energy Measures in Refugee camps. GTZ
  6. 6.0 6.1 GIZ DADAAB Household Energy Programme in Kenya (2011)
  7. 7.0 7.1 Interview with Agnes Klingshirn 28.11.2012
  8. WFP (2012) WFP Handbook on Safe Access to Firewood and Alternative Energy. WFP.
  9. Urban, F. and Lind, J. (2010) Low carbon energy and conflict: A new agenda. HEDON Boiling Point. issue 59 — 2011
  10. GTZ-HERA (2007) Die Sonne bringt es an den Tag: Möglichkeiten zum Einsatz von Solarkochern in Entwicklungsländern. GTZ
  11. Safe Access to Firewood and alternative Energy. Background Reader to the WFP Workshop 20-21 Sept 2012



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